Cette augmentation « on la prend de plein fouet, comme les autres », explique Sylvie Cobigo, monitrice d’auto-école à Rugles. Cette hausse du carburant pourrait donc augmenter le prix des heures de conduite dans un futur proche.
En effet, si beaucoup trouvent que le permis peut coûter cher, en raison du prix des heures de conduite, il faut aussi remettre les choses dans leur contexte. Sur une heure de conduite, de nombreux facteurs plombent la facture. Entre le salaire du personnel, les charges du bureau, la voiture, l’assurance, et évidemment le carburant, « le bénéfice est très très faible par heure », atteste Sylvie Cobigo.
« Je préfère bosser au taux horaire des plaquistes et des artisans ». David Cailleaux, moniteur à Breteuil, compare, lui, la rentabilité d’une heure de conduite à un café servi dans un bar, entre bénéfices et coût de revient. David Cailleaux explique.
« Sur une heure de conduite, il ne nous reste pas 3 € ».
12 € par plein
Pourtant, pour essayer de soulager la facture, la TVA sur le carburant leur est déjà remboursée. Mais ce n’est pas le cas la TICPE (la plus grande part de taxes récupérée par l’Etat, Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, voir infographie). La part de taxe représentant à elle seule environ 60 % du prix total.
« Sur 60 %, j’aimerais savoir ce qui va pour les routes, pour la prévention, etc. ».
Le plein d’une voiture d’auto-école est généralement fait tous les trois jours et demi, et l’augmentation du prix du diesel accuse, pour Sylvie Cobigo, une augmentation de 12 € par plein, pour trois voitures, très vite la facture flambe, cela fait 200 € en plus par mois. De son côté le patron de Breteuil constate une augmentation de 9 € par plein, avec deux voitures, cela représente 150 € de plus.
« La vie, ce n’est pas que survivre, c’est aussi vivre ».
Il accuse un autre souci, indépendant de la volonté des auto-écoles rurales, c’est qu’en campagne, les élèves n’ont pas forcément la possibilité d’aller à la leçon, alors il faut encore rajouter cinq à dix kilomètres à chaque heure, juste pour aller chercher l’élève.
A lire aussi : CARBURANTS : EMMANUEL MACRON « ASSUME » LA HAUSSE DES TAXES MAIS FAIT UN GESTE POUR LES AUTOMOBILISTES
Le souci, c’est que le prix de ces heures de conduite est décidé librement par la direction des écoles de conduite pour une certaine durée, sans augmentation pendant cette période. Si bien qu’en attendant le 1er janvier 2019, l’augmentation du prix de l’essence grignote le bénéfice des entreprises, qui doivent, sans pouvoir augmenter les heures pour l’instant, prendre sur leurs bénéfices.
« Je ne peux pas produire plus qu’une heure de conduite par heure ».
David devrait augmenter le prix à l’heure de ses leçons, la dernière ne date pas d’hier « depuis 10 ans, j’ai dû augmenter une fois mes tarifs ». Il augmentera ses tarifs, c’était prévu au premier janvier, mais à cause du prix du carburant, cela risque d’être un peu plus que prévu. En janvier, pour l’auto-école de Sylvie Cobigo, il va là aussi y avoir une répercussion. « Il faut qu’on équilibre », justifie Sylvie Cobigo.
Alternatives
Les auto-écoles, comme les particuliers aimeraient consommer moins, aimeraient consommer plus propre, mais quelles solutions s’offrent à eux ? Pas grand-chose. La monitrice demande.
« On pourrait rouler avec autre chose, mais qu’est-ce qu’on nous propose ? ».
L’hybride est selon elle trop haut de gamme, et rouler à l’électrique est impensable, du fait de sa faible autonomie pour le moment. Et puis, puisque la transition écologique est en ce moment dans toutes les bouches, David Cailleaux pose la question. « Qu’est ce qu’on va faire des batteries ? ». Il accuse une répartition non équitable du prix.
Autre alternative, l’hydrogène… Peu développée pour le moment, l’énergie est pourtant inépuisable, et semble non polluante. Inépuisable, donc difficilement rentable. Le patron de l’auto-école de Breteuil demande.
« Est-ce que l’Etat et les industries accepteraient ça, est-ce que ça ne serait pas un manque à gagner ? »
Si les gilets jaunes ne sont pas entendus, le carburant augmentera encore en janvier, à cause des taxes.
« On va perdre énormément, mais il ne vaut mieux pas regarder, parce que ça fait mal au cœur ».
Pris à la gorge, ils ne peuvent plus rien réduire « les salaires, les assurances, les voitures, ce n’est pas compressible ». L’augmentation du prix de l’heure de conduite semble alors inévitable si rien ne change d’ici un mois…