Comme dans le reste de la France, les Alençonnais se supportent de plus en plus mal et les moments de fête, comme la finale de la Coupe du monde de foot, semblent une brève parenthèse.
D’ailleurs, au soir du 15 juillet 2018, le centre-ville d’Alençon a parfois ressemblé à une mini-décharge.
Les incivilités ont un coût social, environnemental et financier. Elles dégradent le cadre de vie et coûtent cher au contribuable.
Tout-le-monde
Les incivilités ne concernent pas seulement le jeune habitant un quartier pauvre, issu de l’immigration.
Non. Tout le monde, sans exception : les moins jeunes, les Blancs, les hommes, les femmes, tout-le-monde, quelle que soit l’épaisseur du portefeuille. Il suffit de regarder.
Et à l’instinct grégaire du jeune peut être opposé le comportement ronchon du senior.
Bagnole sacrée
Des exemples ?
Regardons le monde alentour : en un quart d’heure, la besace est remplie.
Principale incivilité : les infractions au Code de la Route.
Les automobilistes qui roulent trop vite, pressés de rejoindre le tombeau ? C’est leur problème.
Par contre, ils mettent la sécurité des autres en danger.
Et là, au volant, on trouve de tout à bord d’un 4×4 ou d’une voiture pourrie, le jeune blanc-bec, le senior d’âge avancé qui ne conduit pas son véhicule mais qui est conduit par sa voiture.
Il ne faut pas reprocher aux seniors de conduire lentement mais de conduire imprudemment.
Ils veulent la mort ?
La route, c’est aussi le klaxon de l’impatient au feu rouge, la queue de poisson d’un automobiliste faite (lundi 15 octobre) au détriment d’une femme cycliste, place De Gaulle : elle a eu peur et aurait pu chuter.
La route, c’est donc aussi les cyclistes qui, parce qu’ils sont cyclistes, font n’importe quoi.
Qui, avenue du Général Leclerc, roulent à 7 h 30 sans lumière et sans élément réfléchissant : ils veulent mourir en chantant « Mon pays, c’est la mort » ?
Les piétons qui traversent n’importe où, n’importe comment.
Les joggeurs, n’en parlons pas…
Rien ne dispense les bipèdes de regarder à droite et à gauche avant de traverser.
Dans le train
Maintenant, grimpons dans le train.
Entre Alençon et Le Mans, il téléphone durant 30 minutes, incapable d’aller passer son coup de fil un peu plus loin, là où c’est possible.
Dans le même wagon, elle téléphone, parlant bien fort, pour réserver un taxi. Ça coupe. Les problèmes de réseau ont du bon.
Dans les cimetières
Les incivilités, c’est aussi, pêle-mêle, les tags sur les biens privés (et qui n’ont rien à voir avec le street-art), les rétroviseurs brisés, les portières rayées, les pneus crevés…
Qui porte plainte ? Pas tout le monde, sans doute parce que « ça ne sert à rien. La Police a d’autres chats à fouetter ».
Les mégots sur la voie publique, aux abords (ou non) des cafés : un phénomène en hausse depuis qu’il est interdit de fumer à l’intérieur. On se demande d’ailleurs pourquoi l’hypermarché Carrefour a installé un « bac à mégots » : les fumeurs l’ignorent.
Les vols dans les cimetières (certains fleurissent les tombes à pas cher).
Les gens qui ne respectent pas les personnes âgées, lesquelles, parfois, savent aussi vous passer devant à la caisse d’un magasin… avec un petit sourire bien minaud.
Potin
Les pétrolettes qui font un potin d’enfer.
Le silence profané et le bruit en général, même s’il faut être moins exigeant que les moines chartreux.
Les ampoules de l’éclairage public (rue de la Fuie des Vignes) dégommées.
Le mobilier urbain dégradé (le city-stade du parc Moulinex a disparu).
Les bornes d’eau-incendie et les compteurs publics sur lesquels se branche une catégorie d’habitants.
Les secrétaires des médecins qui se font engueuler par des patients.
Les agressions à la Sécu, à la CAF, aux Urgences.
Les femmes considérées comme des objets par des goujats, les mecs jugés sur leur physique par des pétasses.
Les propos homophobes.
Les racismes, les populismes, les simplicismes, les simplet-ismes.
Les places Handicapés non respectées.
Le téléphone qui sonne en plein concert à l’auditorium ou au cinéma.
Les chats empoisonnés.
Les radars tagués.
Au travail
Les incivilités, c’est aussi dans le monde du travail.
Les toilettes maculées, les mecs qui pissent debout mais ont du mal à diriger le jet, ceux qui oublient de désodoriser après avoir déposé un gros colis, les collègues traîne-savates des couloirs, diplômés en brassage de vent, spécialistes de la déconcentration.
Bonjour l’impolitesse
Il y a aussi les handicapés du bonjour, du « s’il vous plaît » et du merci.
À Alençon, vous pouvez arpenter le trottoir du cours Clemenceau depuis des années, y croiser les mêmes personnes, ignorer leur nom… mais vous leur dites bonjour, verbalement ou avec les yeux. Certains font de même. Pour d’autres, c’est impossible. Même s’ils vont à la messe tous les week-ends. À quoi ça sert qu’un Palestinien barbu et chevelu ait dit, il y a deux millénaires, « Aimez votre prochain comme vous-même » ?
Idem à l’hypermarché, quand vous y allez chaque semaine à la même heure.
Espionnite
Le mal-vivre ensemble, c’est aussi la bassesse d’esprit. Exemple : celle des voisins qui vous épient et notent les allées et venues chez vous, un peu comme au temps de la police politique en Amérique du Sud et dans les pays de l’Est. Eh oui, certains voisins, ça ose tout, c’est à ça qu’on les reconnaît.
C’est encore le voisin qui fait du potin, écoute de la musique de qualité discutable à pleins décibels, les regards agressifs, le VTT qui s’envole, l’équipement public caillassé (à la Plaine des sports, la tour de chronométrie, à peine édifiée, a été vandalisée par un jet de pierre), la pelouse tondue le dimanche à 15 h, le gamin qui (sur le trottoir) ne maîtrise pas sa trottinette électrique, les vélos qui circulent à fond la caisse sur les trottoirs, le voisin de bus qui ne sent pas la rose, etc.
Droits
Il y a aussi la menue fraude.
Mais qui montre l’exemple ? Jérôme Cahuzac ? Claude Guéant ?
Le monde politique ? Sur la forme, il a l’œil rivé sur l’horizon électoral.
Sur le fond, il privilégie le comportement individuel au comportement collectif.
C’est aussi les recrutements en fonction d’autres critères que la compétence.
Les passe-droits.
Les droits au détriment des devoirs.
La solidarité ? Combien de fois est-elle authentique ?
Les saligauds, c’est aussi le manque de classe, la désinvolture morale, les gens qui crachent par terre, qui éternuent presque sous votre nez (avec l’humidité et la « mauvaise » saison, ça va s’accentuer).
Repli
Manque de savoir-vivre.
Manque de vouloir-vivre ensemble.
Connectés au virtuel, mais déconnectés du réel.
Incivilité rime avec insécurité, même si la première est plus diffuse, moins sanctionnante.
Tout cela est source de stress. De découragement aussi. « Je n’ai plus envie de sortir, je suis trop dégoûtée », confie une habitante rabrouée par une femme au volant d’une grosse bagnole qui lui a refusé la priorité : « il y a un mode de fonctionnement de la société que je ne comprends pas ».
Quelles solutions ?
Alors, que faire ?
Multiplier les agents de surveillance de la voie publique ?
Engager des agents de police en civil ?
Fédérer ?
Prévenir.
Réprimer.
Associer.
Inciter.
Veut-on vraiment vivre ensemble ?
Responsabiliser et demander « Dans quelle société voulez-vous vivre ? ».
Demander cela aux enfants et aux parents (hier, le regard d’un père et/ou d’une mère suffisait à recadrer un enfant…).
Pourquoi pas, dans les conseils municipaux, un « adjoint à la vie quotidienne » ?
Nos villes (Alençon, Sées, Fresnay, etc.) peuvent devenir des laboratoires pour trouver un remède, un vaccin.
Dès lors, on peut imaginer des policiers, gendarmes et magistrats au chômage technique.
Sans toutefois supprimer des postes car ne nous leurrons pas : il faut rêver… éveillé.
Pour finir, une question : était-ce mieux avant ?
Peut-être.
Mais espérons que c’est moins bien que demain.