Il était 19 h 55 mardi 5 mars 2019 lorsque la présidente de la cour d’assises du Finistère, à Quimper, a décidé de suspendre l’audience.
Depuis la veille, un homme de 79 ans est jugé pour tentative d’assassinat de son ex-compagne. Les faits remontent au 18 avril 2017 à Brest.
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Pour ce deuxième jour de procès, les débats ont duré plus de 9 heures. Que faut-il en retenir ? Tout d’abord au moins une question : l’accusé ment-il ou est-il innocent ?
Qui ment ? L’accusé ou les huit témoins entendus ?
Le mensonge ? Il l’a répété à plusieurs reprises qu’il n’y avait jamais recours. Exemple : lorsque la voisine de son ex-compagne vient témoigner à la barre.
Cette fonctionnaire des impôts, en retraite, a sans doute sauvé la vie de la victime en donnant une claque à l’agresseur ainsi qu’un coup dans ses parties intimes pour qu’il relâche son étreinte.
Elle a ensuite conduit la victime dans son appartement. C’est également cette voisine qui a appelé la police.
Devant la cour, elle assure que le câble de télévision était enroulé autour du cou de la victime. Que deux ou trois tours avaient été passés. La présidente, Claire Fouquet-Lapar, interroge alors l’accusé qui nie les faits.
« Pourquoi cette femme dit-elle cela alors ? », poursuit la juge. Réponse :
Je n’ai pas d’explication. Cette femme ment. Il n’y a aucune ambiguïté. Le câble de télévision n’a jamais quitté ma main droite. Dans mon éducation, il ne fallait jamais mentir. Chez moi, c’était banni.
Et la présidente d’insister : « Il ne vous est jamais arrivé de mentir ? » L’accusé : « J’ai toujours fait face à la vérité, quelles que soient les circonstances. Cela a toujours été le cas jusqu’à présent. Pourquoi cela changerait aujourd’hui ? »
Un homme qui a deux facettes
Cet échange de quelques minutes résume assez bien la deuxième journée de ce procès qui a vu défiler un enquêteur de police de Brest, la victime, la sœur de cette dernière, sa voisine et cinq de ses amis.
L’entourage familial comme amical a brossé un portrait identique de l’accusé. « Cultivé, affable, bon cuisinier » d’un côté mais aussi violent verbalement, « humiliant, colérique ». L’un d’eux confie :
Quand nous étions invités chez eux, il fallait toujours aller dans son sens dans la conversation sinon cela pouvait monter vite.
Une autre femme du même groupe d’amis de la victime ajoute :
Il pouvait devenir violent en paroles subitement pour des broutilles si bien que nous avions fini par décliner leur invitation à dîner.
Un des exemples cités concerne un pique-nique en 2008 sur les bords du canal de Nantes à Brest. Selon plusieurs témoins, l’accusé en train de couper du saucisson aurait alors planté son couteau dans la table au motif que sa compagne aurait oublié des assiettes ou des couverts. « Je n’ai jamais participé à un pique-nique le long du canal », rétorque l’intéressé pour sa défense.
Insultes, menaces, main courante
Un incident est également évoqué en novembre 2013 à l’issue d’une répétition de la chorale dont la victime faisait partie. En 2003, elle y avait convié son compagnon.
Dix ans plus tard, le couple est au bord d’une première séparation. L’homme cherche alors à s’en prendre à sa compagne. Il la couvre d’insultes et la menace : « Salope, grosse vache, je vais te buter », rapporte un témoin. L’accusé s’en défend :
Je n’insulte pas les gens comme ça, Madame la présidente. Ces propos sont une aberration totale.
A l’issue des témoignages, l’interrogatoire de la présidente va durer plus d’une heure trente pour tenter de soumettre l’accusé à ses incohérences.
Elle va également lui rappeler un fait de violence commis le 13 avril 2018, cinq jours avant la tentative d’assassinat pour laquelle il comparaît devant la cour d’assises.
Son ex-compagne dépose alors une main courante au commissariat de police de Brest. Elle part se réfugier chez l’une de ses sœurs dans le Morbihan.
Un enquêteur ordonne à l’agresseur de ne pas s’approcher de son domicile, au 2 rue du Petit Kerzu. Plusieurs éléments montrent qu’il s’y est pourtant rendu à au moins deux reprises jusqu’au 18 avril 2017, jour de la tentative d’assassinat.
L’accusé s’explique en disant qu’il devait y aller pour récupérer des affaires, des outils pour aménager son nouvel appartement, rue du 8-mai à Brest.
Ses réponses restent évasives y compris quand la présidente le fait réagir sur les témoignages entendus plus tôt dans l’après-midi.
Est-ce que vous vous rendez compte du nombre de groupes de gens qui mentent pour vous enfoncer ? C’est tout de même effarant de voir autant de personnes se liguer contre vous ?
L’accusé n’a pas d’explication : « Je ne comprends pas. C’est très désagréable à encaisser. »
L’audience reprend mercredi 6 mars 2019 à 9 h par de nouvelles questions.