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Que retenir des grands débats à Rouen ? « Si c'était juste pour gérer une merde... »

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Le 1er février 2019, le député LREM de Rouen organisait un débat sur la démocratie et la fiscalité.

Le 1er février 2019, le député LREM de Rouen organisait un débat sur la démocratie et la fiscalité. (©Mathieu Normand/76actu)

Le grand débat voulu par le président de la République Emmanuel Macron, pressé par les Gilets jaunes, prend fin vendredi 15 mars 2019. Au total, 160 réunions locales se sont tenues en Seine-Maritime. À Rouen, la mobilisation a été conséquente. Élus et associations militantes ont mouillé la chemise pour faire vivre cet instant de démocratie. Exercice « trop figé » ou « réussite », crainte de la récupération politique… Les avis divergent après deux mois d’effervescence.

Lire aussi : Grand débat national : dans les coulisses du premier atelier organisé à Rouen

« Un véritable engouement »

Le représentant du grand débat national en Seine-Maritime, le secrétaire général de la préfecture Yvan Cordier, n’hésites pas à parler de « succès » :

Certains étaient sceptiques et finalement, on constate qu’il y a eu un véritable engouement. Il n’y a eu aucun incident. On a réussi à créer des espaces de dialogue et c’est à l’honneur de notre démocratie.

Une ferveur constatée par Marie Atinault, membre du groupe de travail du Conseil économique, social et environnement de Normandie (Ceser) pour le compte de France nature environnement. Cette militante écologique a observé et animé une douzaine de débats. « Tout le monde a explosé » avec  » beaucoup de rancœur à sortir », a t-elle constaté : « Il y avait une très grande diversité de personnes qui ont trouvé là un espace pour s’exprimer. »

Damien Adam, député LREM de la 1er circonscription de Seine-Maritime a organisé deux débats à Rouen, qui ont réuni près de 300 personnes. Il s’est vu renforcé dans ses convictions, mais a pu aussi découvrir de nouvelles aspirations du peuple :

Par exemple, ces débats ont renforcé ma conviction concernant le maquis des aides possibles pour la transition écologique. À l’inverse, ça a permis d’attirer mon attention sur la reconnaissance du vote blanc et le vote obligatoire.

« On n’a pas échangé »

Le député Damien Adam, le 1er février à Rouen.

Le député Damien Adam, le 1er février à Rouen. (©Mathieu Normand/76actu)

Jean-Christophe Turpin, étudiant en droit à Rouen, a participé à la réunion de travail du 1er février proposée par le parlementaire. Ce militant de la France Insoumise s’est retrouvé attablé avec six autres citoyens, avec pour animatrice, une collaboratrice de Damien Adam. « J’avais peur que se soit un meeting à la Macron, comme il l’a fait devant les maires, et quand j’ai vu que c’était des groupes de travail réunis par table, j’ai trouvé ça positif. Mais finalement, c’était très figé, on n’a pas échangé. »

Jean-Christophe, qui a vu « beaucoup de sympathisants En Marche », était venu pour « défendre [ses] idées », mais n’a « pas eu l’occasion de le faire ». « Il fallait répondre à des questions fermées par « oui » ou « non », tout en étant pressé par le temps », regrette l’étudiant de 31 ans.

En plus de participer à ce débat à Rouen, il s’est rendu à celui de Mont-Saint-AignanBernay (Eure) et dans un village près de Lisieux (Calvados). « À chaque fois, la forme était différente, cela prouve que ce n’est pas un exercice auquel nous sommes habitués et cela pose question pour notre démocratie. » Jean-Christophe reste cependant convaincu du bienfait de l’exercice : 

Je pense qu’il faut davantage de moments d’échanges comme ceux-là, en améliorant la méthode.

Casser l’entre-soi

Le premier à s’être lancé dans l’organisation d’un temps d’échange, c’est Abdelkrim Marchiani, responsable du mouvement rouennais l’Éveil Citoyen. Au total, il a organisé trois rencontres dans la capitale normande, qui ont rassemblé près de 200 personnes. « On s’est dit qu’il y avait une colère à écouter, d’autant que c’est notre ADN la démocratie participative. »

Pour ce salarié d’une entreprise de transport, le plus appréciable, c’est que ces rencontres « ont cassé l’entre-soi » :

On s’est pris le bec, on a rigolé, mais on s’est écouté. Les gens ont parfois même convergé sur des idées comme une plus forte régionalisation ou la réforme du Sénat.

Absence des jeunes et des habitants des quartiers

Particularité des rencontres proposées par l’Éveil citoyen : la présence de jeunes. « C’est le seul débat où j’ai vu des jeunes », témoigne Marie Atinault du Ceser. Force est de constater que globalement, « il y a eu une absence majeure des jeunes », assure Marie Atinault. Autre population dont l’absence était criante, celle des quartiers défavorisés.

« Ça questionne, interpelle Abdelkrim Marchiani, qui a proposé un débat sur les Hauts de Rouen. Mon explication est que dans ces quartiers, cela fait longtemps qu’ils vivent ou dénoncent les constats fait par les Gilets jaunes récemment. C’étaient les premiers à souffrir de ces injustices. » En revanche, partout la « défiance vis-à-vis des élus et de la professionnalisation de la vie politique » était la même.

L’acte I de la concertation est passé. Maintenant, « le vrai sujet, c’est la suite », analyse le responsable de l’Éveil citoyen :

Nous avons joué notre rôle quand le pays était dans une instabilité inquiétante, maintenant il faut du concret.

« Des réponses fortes et puissantes »

Ce qui intéresse profondément Abdelkrim Marchiani, c’est de savoir « en quoi ce mouvement unique des Gilets jaunes est une opportunité pour transformer notre mode de gouvernance. Si c’était juste pour juguler une colère, gérer une merde, ça laissera un boulevard énorme aux populistes ».

Jean-Christophe Turpin, le militant de la France Insoumise, ne cache pas son « scepticisme » :

Beaucoup de participants redoutent la récupération politique.

Le porte-voix de l’exécutif, Damien Adam, se veut rassurant : « Nous avons prévu de sortir du grand débat avec des réponses fortes et puissantes. Tout cela va prendre du temps. À la mi-avril, les premières annonces seront faites, puis cela va s’étaler jusqu’à la fin du quinquennat. »

Mais tout n’est pas à attendre de l’État pour Marie Atinault, de France nature environnement. Selon elle, « l’enjeu est de permettre l’émergence de solutions locales. Élus, entreprises, etc. doivent utiliser ce qui s’est dit. Par exemple, concernant l’implication des citoyens dans les processus décisionnels, les collectivités locales doivent très vite apporter des réponses. »

Informations pratiques :
15 et 16 mars : conférence citoyenne régionale à la Halle aux toiles de Rouen. Une centaine de citoyens, tirés au sort, échangeront sur les quatre thèmes du grand débat national.
28 mars : au théâtre de Bernay (Eure), présentation du rapport et des propositions du Ceser.
La synthèse du premier débat organisé par Damien Adam est à retrouver ici.


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