Retracez l’histoire des origines de la BD et du roman graphique, dans l’exposition Serial Graveurs, installée jusqu’au dimanche 17 février 2019 à Gravelines (Nord). (©DR)
Unique en France par son sujet, le Musée du dessin et de l’estampe originale sis à Gravelines (Nord) dans le bâtiment de l’Arsenal, fait depuis 1982 un magnifique travail de mise en valeur de l’image imprimée sous toutes ses formes. Jusqu’au dimanche 17 février 2018, vous pouvez y découvrir l’exposition Serial Graveurs, dédiée aux origines de la BD. Zoom sur le roman graphique.
De la théorie à la pratique
En plus de l’image imprimée sont aussi mis en avant dans ce musée les artistes qui s’y consacrent, de Dürer à aujourd’hui.
Outre les expositions, la structure, dirigée aujourd’hui par Virginie Caudron, attache beaucoup d’importance à la pratique. Elle organise des ateliers d’initiation et de sensibilisation à toutes les formes de gravure.
Et puisqu’il n’y a pas de musée sans collections, soulignons que celle de Gravelines est extrêmement riche et que le musée conserve dans ses réserves l’Apocalypse de Dürer, l’œuvre gravé d’Eugène Leroy, des gravures de Goya et de Picasso ainsi qu’un important fonds contemporain.
« Tout pourrait périr : tous les livres, les monuments, les photographies et les documents, si subsistaient les xylographies que Frans Masereel a créées pendant ces dix années. Par elles seules pourrait être reconstruit notre monde contemporain, et de surcroît rien que ces feuilles nous donneraient à saisir l’esprit dangereux, le génie et les remous psychiques de notre époque », disait Stefan Zweig, ami de Frans Masereel en 1923.
Romans en images
Co-commissaire de l’exposition avec Virginie Caudron, l’historien de l’art Samuel Dégardin a entrepris une thèse à l’université de Lille sur l’œuvre de Frans Masereel et ses romans en images.
La dernière fois que l’on a pu voir une grande exposition de Frans Masereel – inspirateur de quelques grands de la bande dessinée comme Art Spiegelman ou François Schuiten – c’était au musée de Gravelines en 1984.
Il faut dire que la date de 2018, centenaire de l’armistice, n’a pas été choisie au hasard puisqu’elle marque aussi la naissance du roman graphique inventé par Frans Masereel avec la publication de 25 images de la passion d’un homme.
Cette série de 25 gravures en noir et blanc, et sans aucun texte, raconte la vie d’un ouvrier idéaliste qui eut le tort de naître pauvre.
Humaniste et pacifiste Frans Masereel qui passa toute la guerre loin des tranchées, travaillant pour la Croix Rouge en Suisse, dénonce à travers toutes son oeuvre l’absurdité de la guerre et l’injustice sociale.
Constatant que le marché de l’art était aux mains des capitalistes, Masereel s’attacha à démocratiser l’accès à l’art. Partisan d’un art social, il choisit plutôt que l’œuvre unique, la gravure. En contrepoint de ses gravures, est présenté dans Serial Graveurs un extrait du documentaire que Jérôme Laffont a consacré à Frans Masereel, Les Mains Libres. Un film remarquable qui va au plus près de l’art de la gravure.
Olivier Deprez est un grand nom du roman graphique. Découvrez son oeuvre dans l’exposition Serial Graveurs, installée à Gravelines (Nord) fin 2018 et début 2019. (©DR)
Quand le « cinématograveur » renouvelle le roman graphique
Graveur plutôt sur bois et dessinateur Olivier Deprez a fondé le collectif de dessinateurs Frémok qui explore le cinéma, la poésie, la gravure, la peinture, la littérature et d’autres domaines de l’art. WREK est son dernier livre paru et c’est aussi le nom du collectif qu’il a formé avec Miles O Shea et Marine Penhouët. Il est par ailleurs l’auteur d’une adaptation graphique du roman de Kafka Le château qui fit grand bruit à sa sortie en 2003.
Les liens entre lui et Frans Masereel sont nombreux à commencer par le fait d’être belge mais le lien essentiel, c’est celui de la transmission puisque ce sont les gravures de Frans Masereel qui ont donné envie à Olivier Deprez de pratiquer la gravure sur bois.
Autre lien entre les deux artistes, celui de l’amour du cinéma car faire un roman graphique pour Olivier Deprez, c’est faire un film d’une autre manière qu’avec une caméra. Les points communs ? L’art du scénario, le cadrage et le montage. Sans oublier qu’un livre peut devenir le support d’un film d’animation. Avec WREK Olivier Deprez va plus loin et transcrit en gravure sur bois des morceaux de films trouvés.
Françoise Objois
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Infos pratiques :
Serial Graveurs, jusqu’au dimanche 17 février 2019. À voir aux mêmes dates, L’assiette au beurre, Félix Vallotton, Crimes et châtiments. Musée du dessin et de l’estampe originale. Tél. 03 28 51 81 00, Site de l’Arsenal, place Albert Denvers, Gravelines. Infos complémentaires sur le site officiel de la Ville de Gravelines.