Ils s’appellent « Les Pisseurs Involontaires de Glyphosate« . En Normandie, ils seront au total 200 à tester leurs urines pour mesurer le niveau de pesticides contenu dans leurs corps. Au moins 20 pour le groupe de Caen, et autant dans les autres groupes de volontaires qui se constituent à Bayeux (Calvados), Rouen (Seine-Maritime), Vernon (Eure), dans l’Orne et dans la Manche où il devrait même y avoir deux groupes.
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200 normands collecteront leurs urines
On pourra ainsi en déduire les zones de Normandie où la pollution est la plus marquée, et constater si les analyses révèlent ou non des différences entre les cinq départements normands.
Le 2 février 2019 à 6h du matin, dans chacun des groupes, après avoir passé la soirée de la veille à échanger sur la question de la dangerosité des pesticides pour la santé humaine au cours de « Nuits du glyphosate », les volontaires prélèveront leurs urines au même moment, selon les mêmes protocoles, et en présence d’huissiers.
Pourquoi je suis volontaire pour participer à l’étude ? Fabienne, 55 ans habite à une vingtaine de kilomètres de Caen. « C’est selon moi un moyen de lutter contre l’usage du glyphosate dont les conséquences sur la santé et sur l’environnement sont avérées. Alors j’essaie d’agir en conséquence, je mange bio et dans mon jardin j’essaie de préserver des espaces pour les insectes, et pour les oiseaux. Mais je ne peux rien contre l’agriculteur qui 5 ou 6 fois par an vient pulvériser dans le champs qui est juste en face de chez moi. Cette étude va permettre de montrer qu’on en trouve partout. Je mange bio mais je sais mon corps révélera des traces. Je veux savoir à titre personnel à quel niveau je suis impactée. Cette action, je l’espère, va participer à faire prendre conscience à une majorité de gens. Pourquoi aller en Justice ? Parce que cela permet de gagner des combats. »
Le glyphosate présent dans le sol, la nourriture, l’eau du robinet et même dans l’air…
Les pesticides sont présents partout, dans la nourriture bien sûr, mais aussi dans l’eau du robinet, dans les eaux de baignades, particulièrement les rivières, et dans l’air que l’on respire. Et même après plusieurs années d’arrêt de l’utilisation du trop célèbre « Roundup » dans son jardin potager, on trouve encore des traces du glyphosate dans le sol.
« Le sujet est trop sensible pour que le moindre détail soit laissé au hasard » explique Caroline Amiel, Conseillère régionale écologiste qui, avec d’autres, a lancé l’initiative à Caen dans le cadre du Mouvement des Coquelicots.
Le principe est de réunir des volontaires d’âges différents, y compris des enfants, hommes et femmes vivant en zone urbaine ou à la campagne, mangeant bio ou pas, afin de mesurer le taux de pollution de la Normandie et de ses habitants… insiste l’élue par ailleurs chercheuse en Biologie à l’Université de Caen.
Interdit pour les particuliers mais autorisé en agriculture
Bien qu’il soit désormais interdit pour l’usage domestique, le glyphosate reste utilisable en agriculture. C’est le sens du combat mené par les « Pisseurs Involontaires » qui relaient en Normandie une initiative lancée à l’origine par les Faucheurs de l’Ariège, afin de faire interdire ces intrants.
Des études indiquent que même à des taux réduits autorisés par l’Union Européenne, le glyphosate, comme 6 autres pesticides, aurait des effets chroniques sur la santé…note l’élue régionale.
Les volontaires vont eux-mêmes financer l’analyse de leurs urines
L’originalité de la démarche des « Pisseurs Involontaires » réside aussi dans le fait que les « testés » pourront eux-mêmes financer les frais d’analyse de leurs urines à hauteur de 135€ par personne. C’est un laboratoire privé indépendant situé en Allemagne qui se chargera de l’étude dont les conclusions seront rendues courant février. A Caen, une association va se créer pour aider au financement de l’étude.
Plus de cinquante groupes de « testeurs » sont désormais formés en France (renseignements sur le site www.campagneglyphosate.com) In fine, l’objectif » est d’engager des poursuites contre l’Etat » conclut Caroline Amiel, « afin d’obtenir l’interdiction totale de l’usage du glyphosate.