Après sa lettre de six pages aux Français, diffusée dimanche 13 janvier 2019, dans les médias et sur les réseaux sociaux, Emmanuel Macron inaugure ses rencontres avec les maires en France par un déplacement dans l’Eure.
Le président de la République fera face, mardi 15 janvier 2019, à partir de 15h à 700 élus normands dans le gymnase de Grand-Bourgtheroulde. Cette localité de l’Eure de 3 800 habitants, située à une trentaine de kilomètres au sud de Rouen (Seine-Maritime) s’apprête à vivre une journée particulière.
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Un contexte social tendu
La venue du locataire de l’Élysée intervient dans un contexte social extrêmement tendu. Depuis deux mois, la crise des Gilets jaunes bouleverse le quinquennat d’Emmanuel Macron. Ce mouvement protéiforme est inédit de par sa durée, de par la violence qu’il génère également.
À ce jour, 10 personnes sont mortes sur des points de blocage, 1 700 ont été blessées. L’Inspection générale de la police nationale a été saisie pour 78 affaires par la justice et 200 cas lui ont été signalés. Chaque week-end, plusieurs villes de France (dont Rouen et Le Havre) sont le théâtre de graves heurts entre manifestants et forces de l’ordre, sous les yeux de badauds effarés. Les agressions contre les journalistes se multiplient. Malgré tous ces débordements, les Gilets jaunes restent majoritairement soutenus dans l’opinion publique.
Au lendemain d’un acte IX qui a vu 84 000 personnes (estimation du ministère de l’Intérieur) manifester dans toute la France, (2 500 à Rouen – source police), l’exécutif cherche une porte de sortie. Ce grand débat national, dont le mode d’emploi est à découvrir ici, est une solution avancée par l’Élysée pour calmer la grogne populaire.
De nombreux Gilets jaunes ne sont pas convaincus par la démarche et qualifient cette initiative élyséenne « d’enfumage », « une manière de gagner du temps pour éviter de répondre aux revendications ». Les opposants à Emmanuel Macron doutent de sa capacité à « changer de cap » et à infléchir sa politique envers les plus démunis.
Des avis mitigés sur le débat
Au Grand-Bourgtheroulde, les habitants sont partagés entre crainte d’éventuels débordements, et enthousiasme d’accueillir le président de la République. Des élus locaux affichent beaucoup de scepticisme en se demandant si la réunion du 15 janvier 2019 se résumera à une « grand-messe » ou si elle laissera place à des échanges fructueux.
D’autres, en revanche, voient dans ce grand débat national une réelle avancée de démocratie participative. Jean-Paul Legendre, président de l’association des maires de France dans l’Eure estimait la semaine dernière dans les colonnes du Courrier de l’Eure que lui et ses collègues souhaitaient être « des facilitateurs de ce débat, y compris auprès des Gilets jaunes ».
Le rendez-vous entre Emmanuel Macron et les maires eurois prendra la forme d’un échange certes cadré et calibré, mais il serait étonnant qu’il ne se résume qu’à ça. Des maires communistes normands veulent ainsi profiter de l’occasion pour interpeller vivement Emmanuel Macron sur le malaise social d’une partie de la population française et « mettre le doigt où ça fait mal ».
Le débat sera animé par Sébastien Lecornu, ministre en charge des collectivités territoriales, ancien maire de Vernon et ancien président du département de l’Eure.
Dispositif de sécurité important
Si l’ambiance dans le gymnase pourrait être, à certains moments, tendue, celle, à l’extérieur, pourrait l’être encore davantage. Un important dispositif de forces de l’ordre sera mis en place pour éviter toute manifestation à proximité du gymnase où se trouvera Emmanuel Macron. Grand-Bourgtheroulde sera bouclée. Les unions départementales de l’Eure et de Seine-Maritime de la CGT appellent à manifester le 15 janvier à partir de 14h au rond-point de Maison-Brûlée (sortie autoroute A13).
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L’inconnue porte sur la mobilisation des Gilets jaunes. Lors de l’acte IX à Rouen, certains appelaient à se rendre à Grand-Bourgtheroulde. Lundi 14 janvier, des Gilets jaunes appelaient sur les réseaux sociaux, à bloquer les ronds-points menant au Grand-Bourgtheroulde afin d’empêcher les maires de participer au débat. Le collège situé à proximité du gymnase fonctionnera normalement le 15 janvier.
Les autorités publiques veulent tout faire pour que cette journée se passe le plus normalement possible au Grand-Bourgtheroulde.
Pas certain toutefois qu’en cette journée particulière, la normalité soit de mise.