C’est dans leurs discrets locaux de la rue du Maréchal-Joffre au Havre (Seine-Maritime), à quelques rues du Rond-Point, que Catherine, Ghyslaine, Éveline, Christian et Diane reçoivent les femmes en recherche d’aide, et surtout d’écoute. Ces cinq bénévoles forment, au sein de l’association AVRE 76, une équipe spécialement dédiée à l’accueil et l’accompagnement des victimes de violences conjugales.
Une femme vivant sous la coupe d’un mari pervers depuis des années, une maman inquiète de voir son mari continuer à appeler les enfants alors qu’une ordonnance de protection a été délivrée, une victime de viol dans son enfance n’osant en parler qu’à l’âge adulte… Certaines reviendront régulièrement, d’autres ne donneront même pas leur prénom. « Chaque situation est unique et nous touche tout le temps à sa manière », confie Christian.
« Un endroit où l’on franchit le premier pas »
Pour accompagner au mieux chaque personne franchissant ses portes, AVRE 76 a formé une équipe pluridisciplinaire. Ancienne infirmière en psychiatrie, juriste ou conseiller conjugal et familial… Les bénévoles apportent des compétences différentes, « un vrai plus dans l’accompagnement », assure Christian.
En règle générale, ils travaillent et reçoivent les victimes en binômes. « Dans un entretien, nous aurons une perception différente des choses, ce qui permet de bien se compléter et de ne pas passer à côté de quelque chose », souligne Ghyslaine. Des rencontres qui sont, surtout pour la première, l’occasion de « demander très simplement à la personne ce qu’elle attend de l’association » et de réfléchir à ce qui peut être fait.
Si nous sommes bien là pour entendre une souffrance, écouter leur plainte, nous ne sommes pas un lieu thérapeutique, rappelle Christian. En revanche, nous pouvons être l’endroit où l’on franchit le premier pas, un tremplin pour rediriger vers d’autres structures si besoin.
Un accompagnement dans les démarches judiciaires
Mettre des mots sur ce qu’elles ont vécu est donc la première étape dans laquelle les bénévoles accompagnent les femmes qui s’adressent à l’association. « En faisant le bilan de ce qui leur est arrivé, elles réalisent progressivement qu’elles sont victimes », explique Diane. Car même si les mentalités ont évolué, « elles arrivent souvent avec un sentiment de culpabilité, souligne Ghyslaine. On le ressent encore vraiment et on est là pour leur dire, leur prouver, qu’elles sont bien des victimes. »
On traite d’abord la souffrance pour pouvoir, derrière, aller sur le plan judiciaire, confirme Christian.
L’association accompagne donc ensuite dans les démarches possibles : remplir les documents administratifs, décrocher le téléphone pour prendre contact avec une assistante sociale, un avocat ou encore se déplacer au commissariat pour déposer plainte ou au tribunal si besoin… « On est aussi là pour lever tous ces obstacles », souligne Diane.
Les violences conjugales en chiffres (2017) :
• 130 femmes ont été tuées par le partenaire ou ex-partenaire, soit une femme tous les 2,8 jours
• 219 000 femmes majeurs déclarent avoir été victimes de violences physiques et/ou sexuelles par leur conjoint ou ex-conjoint. Moins d’une victime sur cinq a déposé plainte
• 94 000 femmes majeurs déclarent avoir été victime de viols et/ou de tentatives de viol
Être entendues, déjà la moitié du chemin
Un suivi qui peut durer le temps d’une ou deux rencontres, ou bien plusieurs mois. « Ce n’est pas toujours évident et les choses se mettent en place petit à petit », souligne Ghyslaine. Jusqu’au moment où, comme pour une dame que Diane a récemment suivie, « on ne recevait plus de demande de rendez-vous. Je l’ai appelée car j’étais inquiète et j’ai sentie que ça y est, elle était bien plus forte, droite dans ses baskets », sourit la jeune bénévole.
Des victoires qui ne cachent pas certains coups durs.
Parfois, nous n’avons pas les outils, pas d’armes pour agir, regrette Diane.
Des situations qui ont poussé l’association à renforcer au fil du temps son travail en réseau, que ce soit en lien avec les assistantes sociales, la maison de la justice et du droit ou diverses associations. Elle assure également des permanences au tribunal, et depuis peu, au commissariat.
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Quoiqu’il en soit, Christian tient à le souligner : « ces femmes viennent ici et déposent leur souffrance. Même s’il n’y a parfois pas beaucoup d’avancées sur le plan judiciaire, elles vont déjà mieux d’avoir été entendues, écoutées. C’est la moitié du chemin. »
Informations pratiques :
Avre 76, 168 rue Maréchal-Joffre, au Havre.
Tél. 02 35 21 76 76 ou avre.76@wanadoo.fr
Rendez-vous gratuit et confidentiel.
Plus d’information sur le site de l’association en cliquant ici.