Décidément, Amazon inspire les personnalités de Toulouse contre elle. Après le coup de gueule du patron de Sigfox, Ludovic le Moan, en janvier 2019, qui avait qualifié le géant américain de « plus grand prédateur de la planète » et de « machine impitoyable », ou l’appel aux Toulousains du maire Jean-Luc Moudenc à consommer dans les commerces du centre-ville plutôt que sur Amazon, c’est une autre figure bien connue à Toulouse qui s’attaque à Amazon : le patron de la librairie Ombres Blanches, Christian Thorel.
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La « prédation, exercice principal d’Amazon »
Dans une lettre adressée à Vincent Montagne, propriétaire des éditions du Seuil et président du Syndicat national de l’édition, relayée par le site ActuaLitté, le libraire toulousain tire à boulets rouges sur la présence d’Amazon à la 39e édition du Salon du Livre de Paris. La plus grande manifestation littéraire de France se déroulait dans la capitale du 15 au 18 mars 2019, porte de Versailles :
Vous avez accepté la présence de la société Amazon en plein milieu du Salon du Livre comme une évidence. Vous avez installé une entité qui compromet les relations entre auteurs et éditeurs. C’est un peu « se tirer une balle dans le pied » que de faire une place aussi spectaculaire à ce qui est l’exercice principal de la société Amazon : la prédation.
« Silence assourdissant », « capitulation »
Pour Christian Thorel, qui ne se rend plus au salon parisien depuis plusieurs années – l’événement a attiré plus de 160 000 visiteurs en 2019 – , ce rendez-vous « devient le lieu d’un silence assourdissant, d’une défaite, d’une capitulation. Cela m’aura évité la honte d’être sous les auspices à venir d’un domination acceptée d’un nouveau maître« .
« Une foire, même pas populaire »
Contacté par Actu Toulouse, Christian Thorel précise qu’Amazon, spécialiste de la vente de livres sur Internet, est présent pour la deuxième année consécutive au salon parisien. La goutte d’eau qui a fait déborder un vase déjà plein à ses yeux…
L’édition est de moins en moins représentée, il y a beaucoup de mangas, mais aussi des places vides… Ce salon n’est plus une vitrine, mais une foire, même pas populaire, sans direction générale. Et ce qui est dérangeant, c’est qu’Amazon a été installé au cœur du salon cette année, leur donnant une visibilité effroyable. Gallimard a poussé un coup de gueule, d’ailleurs. Et tout cela alors qu’Amazon ne paie pas d’impôts.
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Il tire à vue sur l’auto-édition
Menaces sur l’édition traditionnelle, émergence d’un nouveau marché et de nouvelles pratiques… Christian Thorel vise particulièrement les livres auto-édités, une spécialité d’Amazon. « Leurs livres auto-édités, c’est de la prostitution, ils sont médiocres, rarissimement intéressants, un livre sur 1000 s’y retrouve ».
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Dans le monde feutré des librairies, Christian Thorel, patron de la plus grande librairie indépendante de la Ville rose, est un habitué des prises de position sans eau tiède et des coups de gueule. « Je suis le seul à avoir des réactions aussi tranchées. Peut-être est-le privilège de l’âge… ».