Après les dilemmes moraux (L’Idiot de Youri Bikov, Baccalauréat de Cristian Mungiu, Corporate de Nicolas Silhol), les ambitions illusoires (Le Désert des Tartares, de Valerio Zurlini) et les crises existentielles (Bird People de Pascale Ferran), Filmoscopie, qui a consacré sa saison 2018-2019 au Moment du choix de vie, ne pouvait pas ne pas évoquer le choix amoureux, moins dramatique mais plus communément partagé.
Le sujet, il est vrai, est tellement rabâché depuis l’origine du cinéma qu’il est bien difficile à un réalisateur de ne pas tomber dans les clichés romantiques et les emphases tragiques.
Inspiré de « Brève rencontre »
C’est pourtant le défi que le cinéaste Jérôme Bonnell tente de relever dans 5e long-métrage, « Le temps de l’aventure » (2013), inspiré ouvertement de « Brève rencontre » (1945) du génial cinéaste britannique David Lean. On retrouve une femme mûre (« irradiante » Emmanuelle Devos) liée à un homme désespérément absent et rencontrant dans une gare parisienne un inconnu grisonnant et charmeur dont elle tombe brutalement amoureuse (le ténébreux et plein de retenue british Gabriel Byrne d’Usual suspect).
Comme l’héroïne de « Brève rencontre » réfugiée dans la salle d’attente de Milford station, il n’est pas surprenant qu’Alix soit coincée entre réalité et fiction. Elle est projetée une journée dans un présent fantasmé, privée des béquilles qui inscrivent nos contemporains dans la pesanteur des réalités sociales (carte bancaire bloquée, batterie de téléphone mobile oubliée, voix familières désincarnées ou absentes).
« L’espace de quelques heures sur l’écran et dans le silence de la salle de cinéma », confie le président Jean-Louis Bauvais, « le spectateur suit l’errance érotique et parfois même comique d’une femme moderne piégée dans les artifices qui l’entourent et suspendue dans le vide, comme en apesanteur, devenue étrangère à sa propre vie, incapable de trouver la clé du monde adulte avec ses règles et ses choix si difficiles. Chacun pourra décider du dénouement et l’inventer à sa guise ou à son image, choisissant de croire que le départ d’un train peut abolir le hasard ».
Pratique
Séance mercredi 27 mars à 20 h au cinéma L’Aiglon. Le film sera présenté par Jocelyne Sineau, adhérente l’U.I.A. d’Argentan.