Le bâtiment du Quai Charcot à Ouistreham (Calvados), aujourd’hui désert, abritait des bureaux. Un panneau indique qu’il est proposé à la location. L’AG de Lutte contre toutes les Expulsions qui participait vendredi 23 novembre 2018 à la retraite au flambeaux organisée par le CAMO (Collectif d’Aide aux Migrants de Ouistreham) dans le cadre du Festival des Solidarités et de la marche solidaire pour les exilés, a voulu s’en emparer pour ouvrir un squat et mettre à l’abri les dizaines de jeunes soudanais, toujours présents dans la cité portuaire.
Intervention rapide et violente des gendarmes
Une vingtaine de militants de l’AG, et deux jeunes migrants, ont réussi à pénétrer dans le bâtiment abandonné. Un bâtiment « très confortable » assure une membre du collectif qui se trouvait elle-même à l’intérieur. Ils n’auront guère eu le temps de goûter au confort de ces anciens bureaux car la Gendarmerie est vite intervenue.
Une trentaine de militaires du PSIG, a ainsi fait irruption dans le local pour déloger les militants et les jeunes migrants.
L’action été rapide et violente. « On nous a tirés par les cheveux, et plaqués contre les grilles. Ils m’ont écrasé les seins… » témoigne cette militante âgée d’une cinquantaine d’années.
Un militant de l’AG interpellé et placé en garde à vue
De leur côté, les gendarmes ont indiqué « avoir été victimes de violences… » Ils sont d’ailleurs procédé à l’interpellation d’un militant de l’AG, et lui ont signifié immédiatement son placement en garde à vue pour des actes de violence et de rébellion.
Repoussés à l’extérieur, une centaine de militants a fait face aux forces de l’ordre pour tenter de rentrer à nouveau. Les gendarmes ont alors fait usage de gaz lacrymogène pour repousser les assauts. L’échauffourée a duré quelques dizaines de minutes à partir de 21h pour s’achever vers 22h30. Une militante, âgée d’une soixantaine d’années, a dû être prise en charge par les pompiers, présents sur place.
« Vous faites ça parce que je suis un Négro ? »
Les jeunes soudanais qui vivent dans le froid et la peur ont pour certains réagi avec force. L’un d’entre eux, qui parle un très bon français a crié aux gendarmes son désespoir. « Vous faites ça parce que je suis un négro ? «
Les manifestants ont fini par se disperser vers 22h10. Les jeunes soudanais quant à eux se sont évanouis dans la nuit.
Et sur le port de Ouistreham, le problème demeure !
On a tenté de m’empêcher de faire mon travail et on m’a gazé !
Seul journaliste sur place, les autorités ont d’abord tenté de m’interdire d’approcher. Il a fallu insister, beaucoup, au point de dire qu’il faudrait m’interpeller pour m’empêcher de faire mon travail, pour qu’enfin on m’autorise à passer le barrage. Sur place, comme les dizaines de militants massés devant les grilles du bâtiment que l’AG voulait prendre pour donner un toit aux migrants, j’ai été gazé. Le commandant du peloton d’intervention est venu me dire qu’il s’excusait, qu’on aurait dû me laisser passer tout de suite, que c’était un loupé… La gendarmerie s’est excusée pour le journaliste que je suis, mais pas pour les militants présents.